Expertise pénale psychiatrique et Réquisition présentée à un médecin psychiatre

La circonstance que la législation envisage, depuis ces dernières années, le recours à un médecin psychiatre, à des fins autres que l’expertise pénale psychiatrique, interroge la profession sur la mission du psychiatre ainsi requis par les autorités de police ou de justice.

Quelle est la nature, l’étendue de la mission de la personne ainsi requise ? Quelles peuvent en être les limites ?

Il faut bien s’entendre sur le sujet, la mission, le cadre légal de la demande d’intervention du psychiatre.

Il est ainsi à distinguer la demande d’intervention formulée auprès d’un expert psychiatre agrée près la Cour d’appel dans le cadre d’une expertise pénale psychiatrique, et la demande d’intervention présentée par voie de réquisition à un psychiatre, qui n’a pas forcément la qualité d’expert.

La mission de l’expert, notamment dans le cadre de l’expertise pénale psychiatrique, est précisée au sein de la déontologie médicale en ses articles R.4127-105 à R.4127-108 du code de la santé publique.

Ces articles disposent :

Article 105 (article R.4127-105 du code de la santé publique)

Nul ne peut être à la fois médecin expert et médecin traitant d’un même malade.
Un médecin ne doit pas accepter une mission d’expertise dans laquelle sont en jeu ses propres intérêts, ceux d’un de ses patients, d’un de ses proches, d’un de ses amis ou d’un groupement qui fait habituellement appel à ses services.

 

Article 106 (article R.4127-106 du code de la santé publique)

Lorsqu’il est investi d’une mission, le médecin expert doit se récuser s’il estime que les questions qui lui sont posées sont étrangères à la technique proprement médicale, à ses connaissances, à ses possibilités ou qu’elles l’exposeraient à contrevenir aux dispositions du présent code.

 

Article 107 (article R.4127-107 du code de la santé publique)

Le médecin expert doit, avant d’entreprendre toute opération d’expertise, informer la personne qu’il doit examiner de sa mission et du cadre juridique dans lequel son avis est demandé.

 

Article 108 (article R.4127-108 du code de la santé publique)

Dans la rédaction de son rapport, le médecin expert ne doit révéler que les éléments de nature à apporter la réponse aux questions posées. Hors de ces limites, il doit taire tout ce qu’il a pu connaître à l’occasion de cette expertise.
Il doit attester qu’il a accompli personnellement sa mission.

Dans le cadre judiciaire, l’expert psychiatre est l’auxiliaire de la justice et doit en informer la personne examinée. Son rôle est de fournir, dans les limites de la mission qui lui est confiée, les éléments médicaux qui éclaireront la décision du juge (commentaire de l’ordre de l’article R.4127-105).

Ainsi l’expert psychiatre apporte un éclairage auprès du magistrat sur des questions médicales, fournissant les éléments sollicités par la mission d’expertise.

La sollicitation d’un psychiatre, à d’autres fins que l’expertise pénale psychiatrique, par les autorités de police ou de justice apparaît de prime abord différente. De prime abord, puisque, sur  le fond, la demande tend à rejoindre les questionnements que peuvent se voir présenter les experts psychiatres.

Face aux questionnements posés, le psychiatre, parfois en difficulté, s’interroge sur ses limites, ne serait ce que d’un point de vue éthique.

Le psychiatre peut marquer une limite découlant de sa qualification et ses connaissances médico-légales.

En effet, au delà de l’obligation posée légalement de déférer à une réquisition (article L.4163-7 du Code de la santé publique), le médecin psychiatre peut indiquer ne pas avoir la compétence requise pour répondre à la question. Il s’agit d’un motif légitime déontologique.

Valériane DUJARDIN – LASCAUX

Juriste, EPSM Lille Métropole