Isolement et contention – Présentation de l’évolution de l’encadrement juridique, des dispositions actuelles en vigueur

Précisions de l’état actuel du droit en lien avec un certain nombre de questionnements des professionnels relatifs à l’évolution de l’encadrement juridique des mesures d’isolement et de contention et l’annonce d’une révision de la loi.

Les mesures d’isolement et de contention ont été juridiquement encadrées par la loi du 26 janvier 2016, modifiée par la loi du 14 décembre 2020 qui, à la suite d’une décision du Conseil constitutionnel, doit être révisée avant le 31 décembre 2021.

La loi du 14 décembre 2020 doit en effet être révisée dans la mesure où le législateur ne peut autoriser le maintien à l’isolement ou en contention en psychiatrie au-delà d’une certaine durée sans l’intervention systématique du Juge des libertés et de la détention.

Article du code de la santé publique encadrant les mesures d’isolement et de contention

Article L.3222-5-1

  • I. – L’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d’un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. Leur mise en œuvre doit faire l’objet d’une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical.
  • II. – La mesure d’isolement est prise pour une durée maximale de douze heures. Si l’état de santé du patient le nécessite, elle peut être renouvelée par périodes maximales de douze heures dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités, dans la limite d’une durée totale de quarante-huit heures.
    La mesure de contention est prise dans le cadre d’une mesure d’isolement pour une durée maximale de six heures. Si l’état de santé du patient le nécessite, elle peut être renouvelée par périodes maximales de six heures dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités, dans la limite d’une durée totale de vingt-quatre heures.
    A titre exceptionnel, le médecin peut renouveler, au-delà des durées totales prévues aux deux premiers alinéas du présent II, la mesure d’isolement ou de contention, dans le respect des autres conditions prévues aux mêmes deux premiers alinéas. Le médecin informe sans délai le juge des libertés et de la détention, qui peut se saisir d’office pour mettre fin à la mesure, ainsi que les personnes mentionnées à l’article L. 3211-12 dès lors qu’elles sont identifiées. Le médecin fait part à ces personnes de leur droit de saisir le juge des libertés et de la détention aux fins de mainlevée de la mesure en application du même article L. 3211-12 et des modalités de saisine de ce juge. En cas de saisine, le juge des libertés et de la détention statue dans un délai de vingt-quatre heures.
    Les mesures d’isolement et de contention peuvent également faire l’objet d’un contrôle par le juge des libertés et de la détention en application du IV de l’article L. 3211-12-1.
    Pour l’application du présent II, une mesure d’isolement ou de contention est regardée comme une nouvelle mesure lorsqu’elle est prise au moins quarante-huit heures après une précédente mesure d’isolement ou de contention. En-deçà de ce délai, sa durée s’ajoute à celle des mesures d’isolement et de contention qui la précèdent et les dispositions des trois premiers alinéas du présent II relatifs au renouvellement des mesures lui sont applicables.
    L’information prévue au troisième alinéa du présent II est également délivrée lorsque le médecin prend plusieurs mesures d’une durée cumulée de quarante-huit heures pour l’isolement et de vingt-quatre heures pour la contention sur une période de quinze jours.
    Un décret en Conseil d’Etat précise les conditions d’application du présent II.
  • III. – Un registre est tenu dans chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie et désigné par le directeur général de l’agence régionale de santé pour assurer des soins psychiatriques sans consentement en application du I de l’article L. 3222-1. Pour chaque mesure d’isolement ou de contention, ce registre mentionne le nom du psychiatre ayant décidé cette mesure, un identifiant du patient concerné ainsi que son âge, son mode d’hospitalisation, la date et l’heure de début de la mesure, sa durée et le nom des professionnels de santé l’ayant surveillée. Le registre, établi sous forme numérique, doit être présenté, sur leur demande, à la commission départementale des soins psychiatriques, au Contrôleur général des lieux de privation de liberté ou à ses délégués et aux parlementaires.
    L’établissement établit annuellement un rapport rendant compte des pratiques d’admission en chambre d’isolement et de contention, la politique définie pour limiter le recours à ces pratiques et l’évaluation de sa mise en œuvre. Ce rapport est transmis pour avis à la commission des usagers prévue à l’article L. 1112-3 et au conseil de surveillance prévu à l’article L. 6143-1.

Isolement et contention : évolution de l’encadrement juridique

  • Un cadre légal posé à l’article L.3222-5-1 du Code de la santé publique par la loi MNSS du 26 janvier 2016
  • Instruction ministérielle du 29 mars 2017
  • HAS – Recommandations de bonnes pratiques – Février 2017
  • Décision n° 2020-844 QPC du 19 juin 2020 : article L.3222-5-1 du Code de la santé publique déclaré inconstitutionnelle => Abrogation au 31 décembre 2020
  • Un cadre légal modifié par la loi du 14 décembre 2020
  • Décret n°2021-537 du 30 avril 2021 relatif à la procédure applicable devant le JLD en matière d’isolement et de contention mis en œuvre dans le cadre des soins psychiatriques sans consentement
  • Instruction DGOS/R4/2021/89 du 29 avril 2021 relative à l’accompagnement des établissements de santé autorisés en psychiatrie pour la mise en œuvre du nouveau cadre relatif aux mesures d’isolement et de contention
  • Circulaire de présentation des dispositions du décret n°2021-537 du 30 avril 2021 relatif à la procédure applicable devant le JLD en matière d’isolement et de contention mis en œuvre dans le cadre des soins psychiatriques sans consentement
  • Décision n°2021-912/913/914 QPC du 04 juin 2021 : troisième et sixième alinéa du paragraphe II de l’article L3222-5-1 du code de la santé publique relatif au renouvellement des mesures d’isolement et de contention au-delà des durées totales prévues par le texte et de l’information par le médecin au juge des libertés et de la détention déclarés contraire à la Constitution => Abrogation au 31 décembre 2021

Contexte de la révision de la loi du 26 janvier 2016

La loi de 2016 ne prévoyait pas l’intervention du juge judiciaire pour apprécier la régularité de la mise en œuvre de l’isolement et de la contention et ne fixait pas de durées des mesures.

De fait, l’article du Code de la santé publique encadrant les mesures d’isolement et de contention a été déclaré inconstitutionnel – Décision QPC du 19 juin 2020.

C’est dans ce contexte que la loi du 14 décembre 2020 est venue modifier l’encadrement juridique des mesures d’isolement et de contention en prévoyant, d’une part, des durées, et, d’autre part, l’information de tiers et du Juge des Libertés et de la Détention.

Dispositions nouvelles de la loi du 14 décembre 2020

Durée des mesures

Isolement : durée maximale de 12 heures renouvelables par périodes maximales de 12 heures dans la limite d’une durée totale de 48 heures

Contention : durée maximale de 6 heures renouvelables par périodes maximales de 6 heures dans la limite d’une durée totale de 24 heures

Information des tiers et du Juge des libertés et de la détention

Si les mesures d’isolement et de contention sont renouvelées au-delà des durées susmentionnées, le Juge des libertés et de la détention est informé ainsi que les tiers énumérés par le législateur à savoir :  » Les titulaires de l’autorité parentale ou le tuteur si la personne est mineure ; la personne chargée d’une mesure de protection juridique relative à la personne faisant l’objet des soins ; le conjoint, le concubin, la personne avec laquelle le patient est lié par un pacte civil de solidarité ; la personne qui a formulé la demande de soins ; un parent ou une personne susceptible d’agir dans l’intérêt de la personne faisant l’objet des soins ; le procureur de la République ».

Le Juge des Libertés peut alors se saisir d’office pour contrôler la mesure d’isolement ou de contention ainsi que les tiers.

Tableau comparatif présentant les nouvelles dispositions issues de la loi du 14 décembre 2020

Source : CNEH

Dispositions réglementaires relatives à l’information des tiers et du juge des libertés et de la détention

En avril 2021, trois textes ont été publiés venant définir les modalités de délivrance de l’information auprès des tiers, du Juge des libertés et de la détention et les modalités de contrôle du JLD.

Cette note présente le décret, l’instruction et la circulaire concernant l’obligation d’information et la procédure devant le JLD.

Dernière actualité : maintien des mesures d’isolement ou de contention au-delà d’une certaine durée soumis à l’intervention systématique du juge des libertés et de la détention

Les dispositions actuelles de la loi du 14 décembre 2020 doivent être révisées dans la mesure où le Conseil constitutionnel considère que le maintien des mesures d’isolement et de contention au-delà d’une certaine durée doit être décidé par un juge – Décision QPC (Question Prioritaire de Constitutionnalité) du 04 juin 2021. 

Avant le 31 décembre 2021, de nouvelles dispositions sont attendues en vue de définir les modalités d’intervention systématique du Juge pour le maintien des mesures d’isolement et de contention au-delà d’une certaine durée.

Valériane DUJARDIN – LASCAUX
Juriste, EPSM Lille Métropole